La recherche sur la catalyse au cœur de la chimie verte

Marc-André Légaré
Département de chimie, Faculté des sciences et de génie, Université Laval

Marc-André Légaré, étudiant au doctorat en chimie à l’Université Laval, figure parmi les lauréats du mois d’octobre 2015 du concours Étudiants-chercheurs étoiles des Fonds de recherche du Québec. Ce prix lui a été décerné pour un article publié dans la prestigieuse revue américaine Science au sujet de ses recherches portant sur des catalyseurs sans métaux. À la base de ses travaux se trouvent des calculs de modélisation complexes qu’il doit effectuer sur un superordinateur. C’est notre serveur de calcul Colosse, situé à l’Université Laval, qui lui a fourni la puissance de calcul dont il avait besoin pour parvenir à ces résultats.

La recherche sur la catalyse au cœur de la chimie verte

Marc-André Légaré

Marc-André Légaré

Les catalyseurs servent à produire quantité de composés dont on se sert notamment dans l’industrie pharmaceutique, dans le domaine agricole ou en science des matériaux. « L’utilisation de catalyseurs — généralement à base de métaux précieux — permet d’activer des réactions utiles qui seraient autrement impossibles », nous a expliqué Marc-André. Mais il y a un hic : les métaux qui entrent dans la composition de bien des catalyseurs sont non seulement rares, mais pour la plupart toxiques. « À cause de la toxicité et de la rareté des métaux précieux, des options alternatives à leur utilisation en catalyse sont hautement désirables. Cependant, les propriétés uniques des métaux précieux (notamment le rhodium, le platine, le palladium et l’iridium) demeurent difficiles à imiter par d’autres éléments plus légers et non toxiques. Pour cette raison, de nouveaux concepts et de nouvelles stratégies doivent être développés afin de pouvoir utiliser ces éléments plus verts en catalyse. »

Une approche novatrice

Un type de réactions pour lesquelles l’utilisation d’un catalyseur est nécessaire est l’ajout d’une fonction chimique aux liens de carbone et d’hydrogène (C-H), des liaisons qui se retrouvent dans toutes les molécules organiques. C’est sur ce type de réaction que Marc-André et ses collègues se sont penchés avec un regard nouveau. « Notre recherche gravite autour d’une nouvelle stratégie en catalyse de synthèse organique : utiliser deux atomes (de bore et d’azote) dans une même molécule pour activer des liens inertes. En fait, si arrangés correctement, la combinaison du bore (pauvre en électrons) et de l’azote (riche) peut imiter la réactivité d’un centre métallique. Nos résultats montrent que l’action simultanée du bore et de l’azote permettent, pour la première fois, de catalyser une réaction de borylation C-H sans métaux. »

Le calcul informatique de pointe, un outil essentiel

Mais comment trouve-t-on quel élément ou quelle combinaison d’éléments pourra jouer le rôle que tenait jusqu’ici un métal précieux? Un indice : on n’essaie pas au hasard en laboratoire pendant des années! De nos jours, la recherche en chimie fait de plus en plus appel au calcul informatique de pointe, qui permet de chercher beaucoup plus efficacement. « Au cœur de notre méthodologie figurent des calculs de modélisation moléculaire. Afin de concevoir et de prédire l’efficacité de nos nouveaux catalyseurs, nous pouvons optimiser leur structure et quantifier leurs propriétés électroniques par l’utilisation de logiciels de calculs de chimie quantique. Cette étape de prédiction permet non seulement de gagner de l’efficacité dans la conception de catalyseurs, mais aussi de comprendre les propriétés qui sont à l’origine de l’efficacité des catalyseurs sans métaux. » Au cours des deux dernières années, Marc-André a ainsi utilisé plus de 16 cœurs-années de ressources de calcul sur notre superordinateur Colosse. S’il avait utilisé une machine à un seul cœur fonctionnant en continu, il aurait eu besoin de plus de 16 ans pour effectuer autant d’opérations. Parions qu’à ce rythme, peu d’étudiants-chercheurs auraient la patience de finir un doctorat!

Pour en savoir plus – visionner le reportage de Québec Science